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April 16, 2024

Nutrition rénale avec Emily Campbell : La santé intestinale et la MPR

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La relation entre l’intestin et le rein

Au cours des dernières années, notre compréhension du corps et nos connaissances à son sujet se sont grandement améliorées, y compris concernant l’intestin et son microbiome. Nous savons à présent que les bactéries de l’intestin, qu’on appelle le microbiote intestinal, ont une incidence sur la progression des maladies rénales, ainsi que sur d’autres aspects de notre santé, par exemple les maladies digestives, les problèmes de santé mentale ou les maladies cardiovasculaires. Ce microbiote, dans le contexte de l’intestin, constitue en lui-même un organe. Par conséquent, nous savons dorénavant que nous ne pouvons pas considérer le corps comme un ensemble d’organes distincts, car ils sont tous liés les uns aux autres. C’est pourquoi les recommandations nutritionnelles devraient être préventives et holistiques.

Qu’est-ce que le microbiote?

Chaque personne dispose d’un microbiote unique constitué de nombreux types de microorganismes qui sont propres à sa génétique et à ses expériences de vie. Par exemple, les microorganismes auxquels nous sommes exposé·e·s dans l’utérus et pendant l’accouchement, l’endroit où nous vivons et ce que nous mangeons sont autant de facteurs qui peuvent avoir des répercussions notre microbiote intestinal.

KN_2.pngCelui-ci comporte à la fois des bons et de mauvais microorganismes. C’est grâce aux bons microorganismes que nous pouvons rester en santé et éliminer les mauvaises bactéries. Les microorganismes travaillent de concert avec notre système immunitaire, nous aident à digérer les aliments et participent à la synthèse de certaines vitamines dans le corps. Ils peuvent aussi contribuer à nous protéger des agents pathogènes contenus dans la nourriture ou les boissons contaminées. En revanche, si le nombre de mauvais microorganismes augmente, des problèmes de santé peuvent survenir.

Comme ces mots savants peuvent être un peu confus, nous allons prendre le temps d’illustrer ce fonctionnement par un exemple. L’intestin est comme une maison. Tout comme chacun·e d’entre nous a une maison différente, nous avons tou·te·s un microbiote différent. Les « meubles » que nous utilisons pour décorer notre maison (c’est-à-dire notre microbiote) diffèrent. Or, ces meubles dans notre maison sont comparables à nos microorganismes. En effet, si certains (correspondant aux bons microorganismes) peuvent être très propres et en bon état, d’autres ont des taches ou prennent la poussière (l’équivalent des mauvais microorganismes). Dans les deux cas, ce sont grâce à ces meubles que notre maison est fonctionnelle. Tant qu’il n’y a pas de déséquilibre (appelé « dysbiose »), c’est-à-dire tant qu’il n’y a pas plus de meubles en mauvais état qu’en bon état, nous pouvons profiter de notre maison en paix et en harmonie (symbiose).

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Le rôle du microbiote

Des études ont montré qu’il existe une corrélation entre les modifications du microbiote intestinal et le développement de certaines maladies telles que l’obésité, le cancer, le diabète, le syndrome du côlon irritable, les maladies cardiovasculaires et les maladies rénales. Un déséquilibre au sein du microbiote normal peut conduire à une dysbiose intestinale, à un dysfonctionnement de la barrière intestinale ou encore à une translocation bactérienne. Lorsqu’on est atteint·e d’une maladie rénale, une trop grande quantité de toxines urémiques est produite, car le microbiote intestinal change. Or, ce surplus de toxines peut favoriser à son tour la progression des maladies rénales.

Ce n’est que récemment que les scientifiques ont commencé à s’intéresser au lien entre santé intestinale et maladies rénales, et il n’existe à ce jour qu’un nombre limité d’études sur l’évolution de la santé intestinale chez les personnes atteintes de MPR en particulier. Cependant, nous savons que l’intestin assure des fonctions très importantes pour notre santé; non seulement pour la digestion, mais aussi, entre autres, pour la prévention des maladies, ce qui peut avoir des répercussions chez les personnes atteintes de MPR.

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Microbiome intestinal et contrôle de l’inflammation

Les microorganismes tels que les bactéries génèrent des sous-produits, qui peuvent engendrer de l’inflammation dans notre corps s’ils passent à travers la barrière intestinale. Ce processus fait partie de ce qu’on appelle « l’axe intestin-rein », un concept qui suggère qu’un déclin de la fonction rénale a des répercussions sur l’intestin, qui se répercutent à leur tour sur la fonction rénale.

Toxines urémiques

L’urée est un acide aminé que les reins éliminent généralement par le biais de l’urine. Or, chez les personnes atteintes d’une maladie rénale, il arrive que l’urée ne s’élimine pas correctement et se retrouve en grande quantité dans le sang. Une concentration trop élevée d’urée dans le sang peut nous amener à éprouver de la fatigue ou des difficultés à nous concentrer, ainsi qu’à perdre du poids de façon inexplicable ou à perdre le sens du goût. Un taux trop élevé d’urée dans le sang peut favoriser la progression des maladies rénales, ainsi que des changements dans le microbiote intestinal, car un taux élevé de mauvaises bactéries conduit à une augmentation des toxines urémiques. Si notre corps ne dispose pas d’un nombre suffisant de bonnes bactéries pour contrer à la fois les mauvaises et l’augmentation des toxines urémiques, nous pouvons éprouver des symptômes désagréables.

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Les aliments à consommer de préférence pour favoriser une bonne santé intestinale quand on a la MPR

Si vous avez une maladie rénale, la nutrition est l’une des stratégies que vous pouvez mettre en place pour soutenir votre santé intestinale. Pensez à augmenter votre apport en prébiotiques pour favoriser une bonne santé intestinale. Les prébiotiques sont des glucides non digestibles qui servent de nourriture aux probiotiques, c’est-à-dire aux bonnes bactéries, qui constituent notre microbiote. Parmi les aliments les plus riches en prébiotiques, on retrouve les fruits et légumes frais ainsi que les céréales complètes. De plus, les altérations du pH intestinal peuvent favoriser la prolifération de différents types de bactéries et conduire à une acidose métabolique. Consommer plus de fruits et légumes peut vous aider à réduire la charge acide pour éviter de saturer les reins et préserver votre fonction rénale.

Voici les principaux aliments à consommer si vous avez la MPR :

 

Fruits

Pomme, banane et nectarine

Légumes

Asperge, chou, ail, petits pois, topinambour, poireau, oignon, patate douce, échalote, pois mange-tout, tomate et igname

Céréales complètes

Orge, flocons d’avoine, pain aux céréales complètes ou pâtes

Fruits à coque et graines

Noix de cajou et pistaches

Légumineuses

Pois chiches, haricots rouges et blancs, lentilles et soya

Produits laitiers

Babeurre et kéfir

Limitez les produits emballés et transformés. En effet, ceux-ci contiennent une plus forte teneur en sel, ce qui peut augmenter la pression artérielle et avoir des répercussions sur le microbiote. Pour favoriser un bon état de santé général, limitez les aliments contenant des agents de conservation ou des additifs tels que le potassium et le phosphore. N’oubliez pas de lire les étiquettes des produits et d’opter pour des aliments représentant au maximum 5 % des apports journaliers recommandés en sodium par portion. Préparez vos propres repas, optez pour des produits avec la mention « sans sel ajouté » ou « à faible teneur en sodium » et passez en revue la liste des ingrédients pour limiter les aliments contenant des additifs et des agents de conservation.

KN_5.pngEst-ce une bonne idée de prendre des suppléments en probiotiques? Les probiotiques sont des bonnes bactéries qui peuvent avoir des bienfaits sur notre santé lorsqu’on en consomme la bonne quantité. Bien qu’il existe de nombreuses études présentant les bienfaits des probiotiques dans le cadre de certains problèmes de santé, il n’existe aucune recommandation concrète concernant le recours à ces derniers en cas de maladie rénale, et en particulier de MPR. Rappelez-vous que le microbiote intestinal de chaque personne est différent, c’est pourquoi certaines mesures peuvent être plus efficaces que d’autres en fonction de la composition unique de votre microbiote. Consulter un·e diététiste rénal·e peut s’avérer utile pour vous aider à déterminer si la prise d’un supplément en probiotiques pourrait vous être bénéfique.

Votre santé intestinale est importante pour votre santé rénale!

Le microbiote intestinal est unique à chaque personne, et il est très important dans le cadre des maladies rénales. Nous vous recommandons d’inclure des mesures de soutien à votre santé intestinale dans votre plan nutritionnel. Pour ce faire, vous pouvez inclure des aliments qui nourrissent votre corps, mais aussi réduisent les toxiques urémiques et l’inflammation pour améliorer votre microbiote. Un·e diététiste rénal·e se fera un plaisir de vous aider à trouver le régime alimentaire adapté à votre MPR et à élaborer un plan nutritionnel personnalisé. Demandez à votre équipe de soins de santé de vous référer à un·e diététiste. Pensez aussi à consulter votre équipe de soins de santé avant d’apporter des changements à votre alimentation.

Article rédigé par : Emily Campbell est diététiste autorisée et éducatrice agréée en diabète. Elle est titulaire d’une maîtrise en aliments et nutrition. Emily est spécialisée en nutrition pour la fonction rénale et aide les personnes atteintes de maladies rénales à comprendre les rouages de la nutrition afin de les aider à prendre soin de leur santé. Retrouvez-la sur kidneynutrition.ca.